Entrevue avec Drowster, photographe documentaire.
Vallier rencontre: Drowster
Drowster est ambassadeur Vallier depuis nos débuts. À une époque où l’internet n’avait encore jamais vu son visage, le photographe était déjà reconnu pour ses clichés de la ville et des humains qui l’habitent. À la sortie de son livre Travailleurs, Drowster se dévoile aux yeux du public pour raconter le monde tel qu’il le voit à travers l’objectif de son appareil photo. Aujourd’hui Vallier rencontre Drowster - à visage découvert.
Comment es-tu devenu photographe documentaire?
Pendant plusieurs années, je photographiais beaucoup d'architecture et de paysages. Un jour, j'ai réalisé qu'il manquait quelque chose à mes photos: de l'humanité. Depuis ce jour, je me concentre à raconter les histoires incroyables des humains que je rencontre un peu partout sur la planète.
Comment t’es venue l’idée de ton livre Travailleurs?
Après quelques années à faire de longues marches dans les villes que je visitais, j'ai constaté que j'accumulais un bon nombre d'images d'hommes qui travaillaient dans la rue. J'ai nommé le projet The Study of Working Men et j'ai commencé une quête un peu plus sérieuse de photographier des hommes au travail. J'étais particulièrement fasciné par les emplois qui sont difficiles pour le corps, les emplois issus de l'ère mécanique léguée par la Révolution industrielle ainsi que les métiers qui sont voués à disparaître.
D’où t’est venue la passion pour la photographie des métiers?
Depuis un tout jeune âge, je suis fasciné par les métiers que les gens occupent. Au primaire, j'adorais demander à mes nouveaux amis «Qu'est-ce que tes parents font?». Je suis tout simplement fasciné par la manière dont les humains occupent la majorité de leur temps sur cette planète à faire ce qu'on appelle communément le travail.
Parmi tes nombreux voyages, quel pays as-tu trouvé le plus marquant?
L'Iraq et l'Inde. L'Inde est un paradis pour les voyageurs et surtout pour les photographes. Le chaos, les couleurs, les personnages, les paysages; tout y est. Quant à l'Iraq, je suis tombé en amour avec ce pays qui m'était totalement inconnu. L'hospitalité, l'histoire millénaire de la Mésopotamie, le style vestimentaire et la texture des lieux; j'aurais pu y rester longtemps et ne jamais me tanner.
Y a-t-il une rencontre qui t’a particulièrement marquée?
Le fossoyeur en Arménie. Par un temps brumeux, dans un tout petit village dans le fin fond d'Arménie, je suis tombé sur un fossoyeur qui creusait une fosse dans un cimetière. Il était accompagné d'un sculpteur de pierres tombales. Voyant l'ampleur de la tâche, j'ai offert mon aide pour creuser la fosse. J'ai passé les 2 jours suivants à aider les deux hommes, mais également à être invité dans leurs familles pour les repas. Disons que la vodka artisanale qui coulait à flots m'a pris par surprise...
Quelle est la profession la plus inusitée qu’il t’a été donné de rencontrer?
Difficile de choisir...J'hésite entre le vendeur de poissons rouges en Iraq, le nettoyeur d'oreilles en Inde ou le spécialiste de la corne en Inde également.
Quels sont les défis de ton métier?
Ma première réponse serait de ne pas avoir assez de temps dans une vie pour compléter toutes les histoires d'humains que j'aimerais photographier. Par contre, le plus gros défi réside dans le fait que la photographie documentaire et ses sources de financement ont été très chamboulées dans les dernières décennies avec la fermeture de magazines importants comme Life, la transition numérique et la démocratisation de la production vidéo. Je suis en faveur du changement et du progrès, mais ça nécessite tout de même une remise en question constante quant à la place de la photographie documentaire dans nos sociétés à l'ère d’Instagram. Malgré tout, c'est un défi stimulant!
Comment la pandémie affecte-t-elle tes activités?
À ma grande surprise, 2020 a été une vraiment bonne année pour ma photographie. J'ai dû mettre sur pause les projets à l'étranger, mais cela m'a permis de me concentrer sur d'autres projets à Montréal. Je dois dire que je suis extrêmement chanceux d'avoir pu finir Travailleurs avant la pandémie ainsi que d'avoir le soutien des Éditions Cardinal pour mes deux nouveaux projets qui ont occupé la majorité de mon temps pendant les confinements!